3 leçons de vie 'après-cancer' qui ont fait de moi une meilleure entrepreneuse

À quoi est-ce que je pensais lorsque je me trouvais sur ce podium, la récompense dans les mains ? (Pour ceux qui l'ignorent encore, Rosette la Vedette a été élu meilleur webshop de Belgique dans la catégorie Santé et Beauté 2016). À tous ces clients, professionnels de la santé et bénévoles qui m'inspirent au quotidien avec leur énergie et leur optimisme. À eux essentiellement, mais aussi un peu à M. Ronny. Que je suis contente de ne jamais l'avoir écouté...  

Yes we can, M. Ronny !

Wendy : « Imaginez : un bureau défraîchi dans un atelier de couture perdu dans la Flandre profonde. On est 2010.  Moi : a woman with a plan, mais aussi une véritable novice dans l'univers de la confection. Sur la chaise face à moi : « monsieur » Ronny, un vieux briscard, chef de l'atelier, très peu bavard. Il examine de ses gros doigts mon tout premier prototype, tout en ronchonnant et en grognant légèrement. Un modèle de ce que sera le tout premier bonnet de la collection dont je rêve depuis deux ans déjà.

C'est alors qu'il plisse les yeux et me lance : « Vous venez du social, peut-être ? Non, si ? Parce que je les connais bien, moi, ces femmes épuisées qui viennent du social. Elles pensent qu'elles savent coudre et elles veulent créer leur propre collection. C'est pas ainsi que ça marche, hein. Des bonnets de chimio ? Qui est-ce qui va acheter ça ? Et dans des couleurs aussi criardes en plus ? Tout le monde porte une perruque, non ? Ça ne marchera jamais, vous savez. » GLOUPS !

Désolée, M. Ronny. J'ai continué à chercher et j'ai trouvé quelqu'un qui croyait en mon projet. Depuis, plus de cinq années se sont écoulées et Rosette la Vedette vient tout juste de remporter le BeCommerce Award 2016 du meilleur webshop belge dans la catégorie Santé et Beauté. Je suis on ne peut plus ravie de ne pas vous avoir écouté. »

wendy rosseel rosette la vedette

  

Pas de case « entreprise » sans la case « cancer »

« Mon entretien avec « M. Ronny » n'était que le début d'une longue recherche : recherche de tissus, d'un atelier, d'une agence qui pourrait créer le webshop, de contacts dans les hôpitaux, de journalistes intéressés et j'en passe. Tout a commencé un lundi comme un autre, comme s'il s'agissait d'un passe-temps qui aurait dégénéré. Pourtant, l'entreprise s'est développée, doucement mais sûrement, honnêtement mais énergiquement. Et j'ai grandi avec elle. À chaque étape, j'étais de plus en plus sûre de mon coup et je me sentais de plus en plus l'âme d'une véritable entrepreneuse.

Et vous savez quoi ? Sans le cancer, jamais je ne serais arrivée aussi loin. Devoir sauter dans le TGV du cancer du jour au lendemain m'a en effet énormément appris. Et ce sont justement ces leçons qui ont fait de moi une meilleure entrepreneuse. J'ai donc décidé de les partager avec vous. Car vous ne devez pas nécessairement avoir l'ambition de créer votre propre entreprise pour en tirer profit. Elles peuvent aussi vous servir dans un autre contexte, que ce soit chez vous, au travail, pendant votre traitement et bien longtemps après. »  

 martin luther king citation

Leçon n° 1 : Ce n'est pas parce que vous ne l'avez jamais fait que vous n'y arriverez pas

Comme le disait Martin Luther King : « Avoir la foi, c'est monter la première marche, même quand on ne voit pas tout l'escalier ». Il n'est pas nécessaire de voir où l'escalier vous mène pour gravir la première marche. « Au secours, je vais devoir faire de la chimio ! Je n'en ai jamais fait. Je n'y arriverai pas. » Vous ne savez pas ce qui vous attend. Tout cet inconnu, toutes ces incertitudes. Mais vous n'avez pas le choix : il le FAUT. Vous commencez et vous attendez de voir ce qu'il en ressort. Et après chaque séance, vous comprenez mieux comment votre corps va réagir. Vous en apprenez pas mal à votre sujet. Marche après marche.

C'est pareil avec une entreprise. Je n'avais encore jamais tenté l'expérience. Mais pour savoir ce que c'est et si ça marchera, il n'y a pas d'autre solution que de lâcher prise, de sauter et de nager. Comme le disait Lao Tseu : « Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas ». Un pas ou une marche, la leçon reste la même. »

 

Leçon n° 2 : Osez demander de l'aide

« Il faut bien l'admettre, pour un(e) vrai(e) control freak, c'est très difficile. Mais que dit ce proverbe africain encore ? « Seul, on va plus vite. Ensemble, on va plus loin. » Les gens me demandent souvent, étonnés : « Tu diriges Rosette la Vedette toute seule ?!? ». À vrai dire, la réponse est « non ! ». Certes, je n'ai pas (encore) d'employé(e). Mais je suis entourée d'une équipe de fidèles free-lances et partenaires. Mon atelier de couture, les spécialistes web, l'équipe photo, les traducteurs, l'agence de marketing en ligne, la modéliste, le partenaire logistique, etc. Sans leur aide et leur expérience, je ne m'en sortirais pas. Ils m'ont guidée dans un univers qui m'était totalement inconnu.

Mais honnêtement ? J'ai appris à demander de l'aide. J'ai DÛ apprendre. Parce que faire des courses pendant la chimio, en général ça va, mais pas toujours. Conduire jusqu'à l'hôpital avec une forte fièvre ? Il vaut mieux appeler une amie. Se reposer pendant trois jours après une nouvelle cure de chimio ? Rien de tel pour le faire que le canapé de « l'hôtel maman ». Oser demander de l'aide vous rend plus fort(e), au propre comme au figuré. Et vous ne vous faites pas seulement plaisir à vous-même, mais aussi à votre entourage, car vos amis et votre famille sont on ne peut plus contents de voir qu'ils peuvent véritablement signifier quelque chose pour vous. » 

 becommerce award 2016 rosette la vedette

(Une réunion avec notre agence web un jour après avoir remporté le BeCommerce Award : une tarte s'impose !) 

Leçon n° 3 : Restez fidèle à vous-même

« Le cancer, c'est ce que vous avez, pas ce que vous êtes. Je trouvais terrifiant de me présenter comme une « patiente ». Certes, j'étais en plein traitement, mais j'étais bien plus que ça. Je voulais surtout pouvoir rester moi-même et surmonter cette épreuve à ma manière. Un conseil : dites à vos médecins ce que vous ressentez et comment vous voulez qu'ils vous traitent. Je ne voulais pas trop de chicaneries et de compassion, mais une communication ouverte et honnête. Le simple fait de pouvoir consulter les résultats des tests du labo m'apaisait. Je voulais conserver un sentiment de contrôle, aussi petit soit-il, et ils le comprenaient. Ça m'a vraiment aidée. Et n'ayez pas peur de parler de ce qui vous effraie : n'imaginez surtout pas qu'ils attendent de vous que vous soyez Superman ou Superwoman.

En tant qu'entrepreneuse, j'ai aussi puisé l'apaisement dans le fait de pouvoir « faire mon truc ». Je rigole parfois en disant qu'ici, c'est à ma manière ou rien, mais il y a une part de vérité. Chaque entrepreneur est différent et a d'autres ambitions. Les sommets et les gros profits ne m'ont jamais intéressée. Par contre, faire quelque chose qui a du sens et puiser l'énergie dans des projets et auprès de gens passionnants, ça oui. Mon intuition est et reste mon principal conseiller. Vous devez bien entendu planifier, calculer et vérifier avec votre bon sens que votre intuition a raison. Mais n'oubliez jamais qui vous êtes, ce que vous aimez faire et ce que vous n'aimez pas faire. Pourquoi est-ce que j'entreprends : pour vivre ou pour subir ? Que représente le succès à mes yeux ? La liberté d'organiser mes journées comme je l'entends ou la motivation d'être numéro 1, d'enregistrer les meilleurs chiffres de croissance et d'employer 30 personnes ? Écoutez-vous.Optez pour ce qui VOUS donne de l'énergie. Ce que les autres attendent de vous, c'est leur problème. »

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