Jovita regrette que la calvitie soit presque toujours associée au cancer. Elle-même souffre d’une maladie auto-immune qui provoque la perte totale des cheveux. “Je suis contente de pouvoir porter les bonnets et foulards de Rosette la Vedette, mais j’essaie aussi parfois de me montrer au monde sans couvre-chef.”
Une mèche par-ci, par-là
Depuis l’âge de 18 ans, Jovita (32 ans), originaire de Melle, souffre de zones dégarnies dans sa chevelure. “Il s’agissait d’alopécie areata, mais les médecins n’ont jamais trouvé de véritable cause à cette maladie auto-immune. Peut-être le stress ? Le traitement consistait en injections de cortisone chez le dermatologue. À l’époque, cela ne me gênait pas trop : j’avais de temps en temps une petite plaque chauve, mais mes cheveux étaient si épais que je pouvais facilement les camoufler.”
En 2014, lors de sa première grossesse, le problème semblait résolu. “Tous mes cheveux étaient revenus, aussi volumineux qu’avant. Deux ou trois mois après l’accouchement, j’ai recommencé à perdre mes cheveux, mais on m’a dit que c’était typique après une grossesse.” Jovita trouvait néanmoins la chute excessive.
De l’alopécie areata à l’alopécie universalis
Après une grave pneumonie et une hospitalisation, elle a perdu quasiment tous ses cheveux. “Mon corps était affaibli, peut-être à cause d’une immunité réduite ? Je n’ai jamais eu de réponse claire.” Sa maladie avait évolué d’une alopécie en plaques à une alopécie universalis, soit une perte totale des cheveux et poils.
Rapidement, Jovita a choisi de porter les bonnets de Rosette la Vedette. “Quand je suis devenue chauve, j’ai visité un magasin de bonnets et de perruques. On m’a proposé d’essayer une perruque. Mais j’avais eu des cheveux très épais et une perruque n’aurait jamais pu égaler cela. J’avais aussi peur qu’elle tombe. J’ai donc opté pour les bonnets : ils sont doux, sans bords élastiques, ne serrent pas et je peux bouger librement.”
Le lien avec le cancer
Jovita est réaliste. “Mes cheveux ne reviendront peut-être jamais. Il n’existe pas encore de bon traitement. La cortisone donne peu de résultats et a trop d’effets secondaires.
Avant, seuls mes parents connaissaient ma maladie. Aujourd’hui, je ne peux plus la cacher. Je préfère donc être transparente. Je suis enseignante et j’explique en début d’année à mes élèves, âgés de 14 à 16 ans, pourquoi je porte un bonnet.
J’ajoute que je sais que certains feront automatiquement le lien avec le cancer. C’est l’une des choses les plus difficiles : que les gens supposent d’emblée que j’ai suivi une chimio. Récemment, à l’hôpital, quelqu’un m’a demandé directement combien de cures j’avais déjà eues.”
“Cette dame chauve”
Jovita n’a pas encore complètement fait la paix avec sa calvitie. “C’est un long processus. Je suis souvent ‘cette dame chauve’. C’est dur à entendre. Personne n’aime être réduit à un aspect physique. Mais je sais aujourd’hui que je n’ai pas à me cacher. Même avec un bonnet, je peux être jolie. Et en été, je n’en porte même plus.”
Il y a trois ans, lors d’un atelier, elle a été invitée à partager quelque chose que personne ne savait d’elle. L’animateur a suggéré que ce serait libérateur d’enlever son bonnet. “Je l’ai fait et j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Se montrer ainsi est extrêmement émotionnel. Mais c’est ce que je suis.” Pour Jovita, c’était aussi un exemple de practise what you preach : “J’apprends à mes élèves qu’ils doivent être eux-mêmes.”
Lever l’ignorance autour de l’alopécie
Quand nous avons publié un post Instagram à l’occasion de la Journée contre le cancer, Jovita a réagi en rappelant que nos clientes ne sont pas uniquement des patientes atteintes de cancer. “Je me suis sentie un peu oubliée. On réduit parfois trop l’histoire à un seul type de cliente. Bien sûr, sans minimiser les autres vécus : mais moi, je vis sans cheveux depuis quatre ans. Je trouve qu’on devrait donner plus d’attention aux patients souffrant d’alopécie.” Nous avons donc pris contact avec Jovita pour lui proposer de partager son histoire sur notre blog. Elle a accepté immédiatement !
“Je suis plus forte que je ne le pense”
Jovita espère que la calvitie deviendra un jour plus normale dans l’espace public. “Peut-être qu’un jour, les gens – y compris les patients atteints de cancer – oseront se montrer tels qu’ils sont.” Elle a appris aussi à mieux apprécier son corps. “Mon immunité réduite me rend vulnérable aux infections. Mais j’ai quand même mis au monde deux enfants parfaitement en bonne santé. Mon corps ne peut donc pas être si faible. Je suis plus forte que je ne le pensais.”
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